De beau matin, le telephone sonne chez Dara, le narrateur, ecrivain installe a Londres : son ami de jeunesse, a qui il confiait ses esperances politiques mais aussi ses secrets d’alcove, le tire du sommeil pour lui rappeler une vieille dette d’honneur. Plus de quarante ans se sont ecoules depuis leurs annees soixante a Lahore, et Platon, devenu un peintre celebre et controverse, veut que Dara ecrive sa vie. Dara tire aussitot pretexte de cette biographie de commande pour partir sur les traces de ses condisciples d’alors avec qui il militait clandestinement. Disperses a travers le monde, ils ont emprunte des voies fort divergentes. Mais tous, le chirurgien republicain comme le combatant maoiste, vont finir par se retrouver au pays natal pour le devoilement du grand oeuvre de Platon : une toile gigantesque intitule ‘Les Quatre Cancers de Terrepatrie’; ces quatre Cancers, ce sont : l’Amerique, les militaires, les mollahs et la corruption.
Il est bien sur question dans ce roman resolument contemporain du Pakistan d’aujourd’hui, cependant jamais nomme, dont Tarik Ali, figure preponderante de l’extreme gauche antiliberale au Royaume Uni, brosse un portrait devastateur, mais pour des raisons qui ne sont pas forcement celles qu’invoque le discours occidental. Temoin la pseudo-victime de l’islam devenue la coqueluche des medias francais que met en scene l’ecrivain. Si le regard de Tariq Ali est acere, il reste un formidable conteur. Quand il denonce le feodalisme, c’est a travers le personnage de la belle Zaynab, la compagne de Platon, qui, jeune fille, a ete mariee au Coran .. pour eviter que le patrimoine familial ne soit dilapide. Et l’histoire d’amour de Dara avec Jindie, le ‘Papillon d’Or’ du titre, tient le lecteur en haleine tout au long du roman.
On retrouve bien dans cet eblouissant cinquieme volet du Quintet de l’Islam Tariq Ali tel qu’en lui meme : drole, imaginatif, intelligent, satirique, et diablement informe.
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